Sarajevo, de notre correspondante.
Les «Mères de Srebrenica» sont présidées par un homme. L'association s'entend plutôt mal avec les «Femmes de Srebrenica» et mène une guerre ouverte contre les «Veuves de guerre de Srebrenica». On imaginait volontiers un groupe de matriarches courageuses unies par le drame, bloquant la circulation dans Sarajevo toutes les deux semaines, inondant les chancelleries de pétitions et mobilisant l'opinion publique du monde entier pour réclamer la vérité sur le massacre de juillet 1995. L'agit-prop est bien là, mais se déploie de manière chaotique et de plus en plus politisée. Victimes de la guerre, les femmes de Srebrenica sont en passe d'être victimes d'ambitions politiques en temps de paix.
Le problème humain est immense: environ 30 000 femmes et enfants ont vu leurs pères, fils et maris pour la dernière fois aux mains des forces serbes, ou alors qu'ils fuyaient à travers la forêt l'enclave de Srebrenica, abandonnée par l'ONU, pour échapper aux troupes du général Ratko Mladic. Depuis deux ans et demi, ils vivent dans l'espoir de les retrouver vivants. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) estime que l'écrasante majorité des 8 000 personnes disparues, originaires de Srebrenica ou réfugiées dans la ville, ont été tuées. Les dirigeants des associations de familles l'admettent en privé mais n'osent pas le dire à leurs membres. Les exhumations sont extrêmement lentes à produire des preuves. La zone à ratisser est très large, en territoire s