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Libération

Le pouvoir tunisien harcèle une avocate. Me Nasraoui, qui défend les détenus d'opinion, risque 22 ans de prison.

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publié le 30 mars 1998 à 21h42

Ses chefs d'inculpation sont dignes de Carlos ou d'un chef des GIA:

ils vont, pour n'en citer que quelques-uns, de l'«incitation à la rébellion» à l'«outrage à la magistrature et au président de la République», en passant par la «diffusion de fausses nouvelles de nature à perturber l'ordre public». Radhia Nasraoui, appelée à comparaître aujourd'hui devant un juge d'instruction, n'est pourtant qu'une avocate qui s'entête, depuis des années, à défendre les détenus d'opinion, islamistes compris, en Tunisie.

Les intimidations contre cette femme ne sont pas nouvelles: tentative d'incendie de son appartement en 1995 et deux cambriolages de son bureau en 1994 et en 1997. Mais, à l'aube du 12 février, la pression s'accentue: la porte de son cabinet est cassée, le matériel détruit, mais, surtout, l'ensemble de ses dossiers est emporté. Plusieurs ambassades ­ Etats-Unis, Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Suède, Grande-Bretagne ­ dépêcheront un représentant sur les lieux pour constater les dégâts, ce qui leur attirera les foudres du ministère tunisien des Affaires étrangères, qui protestera contre cette «ingérence dans [leurs] affaires intérieures».

Cette dernière et troisième intrusion à son cabinet est survenue quelques heures après que Radhia Nasraoui eut plaidé, avec plusieurs autres avocats tunisiens et en présence de diplomates et d'ambassadeurs étrangers en poste à Tunis, dans le procès de Khemaïs Ksila, le responsable de la Ligue tunisienne des droits de l'homme. Sa plaidoirie a-t-el