Boa Vista, envoyé spécial.
«Il va pleuvoir cette nuit, j'en suis sûr.» Avec son grand plateau incrusté dans la lèvre inférieure, son teint mat et ses colliers, le vieux chaman Kukrit était visiblement dépaysé quand il est arrivé, lundi soir, à l'hôtel Aipana de Boa Vista, celui qui abrite les autorités de passage dans la ville. En face de lui, une meute de journalistes brésiliens l'observaient, sourire ironique aux lèvres. Depuis six mois, l'Etat amazonien de Roraima, au nord du Brésil, vit sous le coup d'une sécheresse exceptionnelle, tout juste entrecoupée de petites averses. Là, 1 700 pompiers et militaires s'échinent à tenter de maîtriser des centaines de foyers d'incendies, sur un front long de plus de 400 km.
Face aux sceptiques, le petit homme insiste, timidement: «Oui, oui, il va pleuvoir bientôt. Bonsoir, je vais dormir.» Kukrit est le plus ancien chaman faiseur de pluie de la tribu kaiapo, qui vit à 1 500 km au sud de Boa Vista. Suite aux incendies qui menaçaient la réserve des Indiens yanomamis, les Kaiapos ont proposé de leur venir en aide et Davi Yanomani, un des leaders de la tribu, a accepté. La Funai, la Fondation nationale de l'Indien, a fourni un avion pour le transport et Kukrit est arrivé, accompagné d'une ribambelle d'enfants et de Mata'i, un autre «faiseur de pluie». Un voyage critiqué par le quotidien la Folha de São Paulo, qui le considérait comme un gaspillage ridicule des deniers publics.
A peine atterris à Boa Vista, pourtant, Kukrit et Mata'i n'avaie