Menu
Libération

Une disparition si opportune""Le procès de Pol Pot aurait embarrassé aussi bien les Khmers rouges que Pékin, Paris ou Washington.

Article réservé aux abonnés
publié le 17 avril 1998 à 23h04

Au début du mois, le président Clinton avait projeté une opération

secrète, révélée il y a quelques jours par le New York Times, visant à «exfiltrer» Pol Pot du Cambodge, afin que celui-ci soit traduit devant une cour de justice internationale. Selon le scénario envisagé, les militaires thaïlandais devaient s'en emparer, s'il traversait la frontière, et le mettre dans un avion à destination d'une base américaine. Occasion manquée puisque Pol Pot est décédé, entre-temps, d'une «crise cardiaque» bien opportune.

Peu de gens avaient intérêt à ce que Pol Pot soit traduit en justice. Ses révélations, s'il avait consenti à parler, auraient été embarrassantes pour beaucoup, à commencer par ses lieutenants. Ainsi Ta Mok, dit «le Boucher», qui détenait Pol Pot depuis l'été 1997, est responsable de la mort d'au moins 100 000 de ses compatriotes. Personne n'a été jugé jusqu'alors pour le génocide cambodgien et l'ouverture d'un tel procès aurait certainement été dangereuse pour les personnalités cambodgiennes qui ont rempli des fonctions de responsabilité dans la hiérarchie pol-potiste. L'actuel co-Premier ministre du Cambodge, Hun Sen, n'aurait sans doute pas été épargné. Ex-commandant adjoint khmer rouge, Hun Sen s'est enfui au Viêt-nam pour échapper à une purge interne au mouvement, avant de revenir avec l'armée vietnamienne, qui l'a installé au pouvoir après 1979. Chea Sim, le président de l'Assemblée nationale, fut également khmer rouge. Le roi Norodom Sihanouk («prince» à l'époque)