Krasnoïarsk (Sibérie), envoyée spéciale.
De sa voix d'outre-tombe, Alexandre Lebed se met à chanter: un refrain qui parle de «cygnes» (lebed en russe). Son interlocutrice vient d'évoquer la signification de son patronyme. L'ancien para reconverti à la politique ne résiste pas à pousser la chansonnette. A l'autre bout du fil, la femme s'esclaffe puis lui adresse ses meilleurs voeux de succès. La voix du général se fait alors caressante pour la remercier.
Depuis une heure et demie, Lebed répond aux appels de la «ligne ouverte», dans l'antenne de l'hebdomadaire Argumenti i Fakty à Krasnoïarsk. Beaucoup ont envie de se confier à ce candidat qui semble tellement à l'écoute. Une femme raconte que son fils, brillant étudiant, s'est vu proposer un poste aux Etats-Unis. Mais elle n'a pas les moyens de l'y envoyer. Lebed prend son nom, son adresse. «On vous aidera, pas moi directement mais des gens qui ont des fonds, promet-il, on vous appelle demain.» Il est 21 h 30: la ligne reste encore ouverte pendant une demi-heure. Lebed ne semble pas fatigué. Tout juste fume-t-il un peu plus. La journée du général, en campagne pour le poste de gouverneur de la région de Krasnoïarsk, se termine entre 1 et 2 heures du matin. Ce soir-là, après un dîner de travail avec son comité électoral, il donnera son dernier interview à 2 heures du matin, en maillot de corps, pantoufles et jogging acrylique. La journée suivante (un dimanche) débute à 7 h 30.
Perte de vitesse. «Si je n'étais pas sûr de gagner, j