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Libération

Sur le sentier des conquêtes indiennes (fin). Guerre du saumon chez les Lummi. Le statut de «nation souveraine» et les droits de pêche des tribus du Nord-Ouest sont menacés.

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publié le 29 avril 1998 à 23h53

Bellingham (Washington), envoyé spécial.

«Au début, la Femme-Saumon nous amena le saumon. Elle lui demanda de se sacrifier pour que nous puissions survivre"» Jewell James, ou plutôt «Loup-qui-prie», montre la statue-totem de la déesse tutélaire grimaçante des Lummi qu'il a sculptée dans un énorme tronc de cèdre rouge. Elle est un des piliers de la «grande maison» où la tribu se rassemble pour les potlatch ­ fêtes traditionnelles. «Nous ne vivons plus la vie que le Grand Esprit nous avait destinée. On nous a dépouillés de nos traditions, de notre langue, de nos chants et de nos rites. A présent on veut faire de nous des individus et des propriétaires âpres au gain. C'est dur de s'adapter à une nouvelle vie"» Il y a dans cette complainte de «Loup-qui-prie», un des derniers sculpteurs de totems d'Amérique du Nord, l'écho des propos célèbres (et apocryphes) qu'aurait tenus, en 1854, son célèbre ancêtre, le chef Seattle: «La moindre parcelle de cette terre est sacrée pour nous" Nous en faisons partie, comme elle fait partie de ce que nous sommes"»

Nouvelles guerres. «Quand on parle d'identité tribale, la base géographique est cruciale, explique Cecil José, directeur du programme d'études amérindiennes à l'East Washington University. La réserve est la manifestation physique de la dimension spirituelle de la souveraineté». Celle des Lummi couvre 4800 hectares sur deux péninsules et une île. Des pics enneigés couverts de forêts millénaires plongent dans les eaux cristallines du Puget