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Doñana, Tchernobyl andalouUne fuite dans une mine de pyrite a déversé cinq millions de mètres cubes d'eaux toxiques dans le parc naturel d'Andalousie. Une catastrophe écologique aux conséquences incalculables.

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publié le 4 mai 1998 à 2h43

Doñana envoyé spécial

La rumeur court dans le village d'Aznalcazar: la cigogne du clocher est morte, empoisonnée. Les tripes éclatées par des cadavres de poissons pourris. «Personne ne l'a vue depuis ce matin, tout le monde est triste, dit Joaquin, c'était une habitante comme une autre.» Depuis la colline d'oliviers, il montre les terres qu'il exploite avec son père et ses trois frères. Ces 70 hectares de tournesol, blé et soja, sur les bords du rio Guadiamar, à l'extrême sud-ouest de l'Andalousie, sont recouverts d'une couche de boue noire et toxique, encore humide et glissante une semaine après la catastrophe. Joaquin, la trentaine athlétique, tourne son regard dur vers la mine de pyrite à ciel ouvert d'Aznalcollar, qui émerge de la vega, la vaste plaine, 25 km en amont.

Marée noire. Le 25 avril, un des murs du réservoir d'eaux résiduelles de la mine a craqué, déversant dans le Guadiamar cinq millions de mètres cubes de saloperies, un mélange d'eau acide et de boues chargées de produits toxiques, zinc, plomb, cadmium, mercure" La marée noire s'est arrêtée plusieurs dizaines de kilomètres en aval, effleurant le parc national de Doñana, la plus belle réserve naturelle d'Europe méridionale. Les conséquences de ce «Tchernobyl andalou», selon le mot d'un homme politique local, sont encore incalculables.

Le Guadiamar a été «assassiné», proclame une banderole sur la place de la mairie d'Aznalcazar. Avec les communes environnantes, le village, dont le rio est l'artère vitale, fait se