Deux étudiants ont été tués par balles hier près de l'université de
Djakarta, et trois soldats ont trouvé la mort dans un autre district alors que des milliers de pillards ont dévasté et incendié les quartiers commerciaux de la capitale. Ce bilan porte à 15 le nombre de morts en trois jours.
Djakarta envoyé spécial Glodok, la ville chinoise de Djakarta, est plongée dans une pénombre étrange. La nuit est tombée, mais les lampadaires sont éteints, et aucune lueur ne brille aux fenêtres. Seuls les incendies des boutiques et des carcasses de voitures qui se consument au milieu de la chaussée permettent de distinguer la masse sombre des foules qui s'ébrouent dans l'épaisse fumée noire. Par milliers, ils sont venus des bidonvilles pour piller les richesses qu'ils pouvaient emporter et détruire le reste. Ce soir, ils sont encore des milliers à arracher aux «sales chinois» les biens auxquels ils disent avoir droit. De la ville chinoise aux airs de terre brûlée reflue une foule chargée de butin. Une incroyable caravane d'hommes, de femmes et d'enfants aux vêtements déchirés, les cheveux collés sur le front par la sueur, les yeux hagards d'excitation. Ils transportent des télévisions, parfois par charrettes entières, des vêtements, des jantes d'automobiles, des sacs de riz, des tôles ondulées qu'on roule pour les transporter sur l'épaule, des bouteilles de sauce de soja enveloppées dans des chemises. «Nous avons faim». Sur le bord des avenues, les petites mains sont déjà à l'oeuvre pou