Djakarta correspondance
Au sol, s'étalent les nattes de paille muticolores sur lesquelles sont assis les prisonniers. Il est trois heures de l'après-midi ce lundi: l'heure des visites pour les détenus politiques de la prison de Salemba, au centre de Djakarta. Victimes de la répression souterraine mais efficace du régime Suharto, ils ont tous échoué là pour la même raison: la contestation du maître suprême.
Ging Ginanjar, 34 ans, est l'un d'entre eux. Journaliste indépendant employé jadis par le magazine Detik, interdit en juin 1994 par le ministre de l'Information, il travaillait depuis lors en free-lance pour plusieurs médias locaux et étrangers, partageant son temps entre ses activités professionnelles et ses activités militantes au sein de l'Association des journalistes indépendants (AJI) un organisme non-reconnu par le gouvernement car hostile au contrôle de la presse en vigueur dans l'archipel.
C'est dans l'exercice de son métier que Ging Ginanjar a été arrêté, le 10 mars dernier alors qu'il couvrait un forum de discussion organisé, en plein processus électoral, par l'actrice Ratna Sarumpaet, aujourd'hui elle aussi sous les verrous. Célèbre en Indonésie, cette femme, qui pratique un théâtre engagé, s'était faite remarquer par un spectacle accusateur, plusieurs fois censuré, qui décrit l'itinéraire d'une femme, Marsinah, retrouvée morte en 1994, alors qu'elle luttait pour défendre les droits des ouvriers.
«Mes conditions de détention sont meilleures qu'elles ne l'étaient aup