Menu
Libération
Interview

«La politique menée au niveau mondial est contre-productive». Pour Ethan Nadelmann, les programmes de lutte contre la drogue manquent de réalisme.

Article réservé aux abonnés
publié le 8 juin 1998 à 3h36

New York, de notre correspondant.

Ethan Nadelmann est le président du Lindesmith Center à New York, une organisation financée par le milliardaire George Soros pour promouvoir des politiques «alternatives» en matière de drogues illicites. Tout en prenant garde de ne pas prôner ouvertement la légalisation totale du marché de la drogue, il insiste sur les échecs de la politique actuelle de «prohibition» menée au niveau mondial.

Au moment où les Nations unies engagent les Etats à mobiliser leurs forces, vous estimez que la «guerre contre la drogue» est déjà perdue" A l'exception de propos vides sur la «réduction de la demande», l'accent sera en réalité mis une nouvelle fois sur les mérites des approches répressives. Or les politiques défendues au niveau mondial ces dix dernières années ont échoué. Pourtant, aucune critique sérieuse des pratiques et stratégies retenues n'est engagée. Affirmer aujourd'hui, comme le fait le Pnucid, qu'un monde sans drogues est possible est la preuve de cette absence totale de réalisme et de pragmatisme. Ce que font les Nations unies, c'est reproduire au niveau mondial la politique menée sans succès par Washington: en 1988, le Congrès américain a passé une résolution déclarant que les Etats-Unis seraient débarrassés de la drogue (drug free) à l'horizon 1995. Le budget de lutte contre la drogue aux Etats-Unis est passé depuis de 1 milliard de dollars par an, en 1980, à 17 milliards cette année ­ dont les deux tiers consacrés à la répression ­, et ce ré