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Libération
Éditorial

Contre l'arbitraire.

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publié le 16 juin 1998 à 3h38

Les journalistes ne sont pas au-dessus des lois. Mais, pour qu'un

journaliste soit envoyé en prison dans un pays démocratique, il faut qu'il ait commis des délits d'une gravité sans nom. Ce n'est pas le cas en Turquie: notre correspondant à Istanbul, Ragip Duran, purge à partir d'aujourd'hui une peine de dix mois de prison pour ce qui s'apparente largement à un délit d'opinion. Libération considère sa condamnation à une peine de prison ferme comme une décision arbitraire et inique, et exprime sa solidarité avec son correspondant. La quasi-totalité de la presse turque et plusieurs organisations de défense des droits de l'homme et de la liberté de la presse ont, elles aussi, exprimé leur solidarité à l'égard de ce journaliste réputé et intègre, qui ajoute son nom à la longue liste des hommes de presse emprisonnés dans ce pays. En s'attaquant ainsi aux «porteurs de mauvaises nouvelles» que sont les journalistes, plutôt qu'aux racines du mal, notamment dans la résolution de la «question kurde» qu'elle traîne depuis tant d'années, la Turquie se rend un bien mauvais service. Un tel comportement ne participe pas d'une modernisation de la vie politique turque souhaitée par une bonne partie de sa population et par son élite. Il donne surtout des munitions à tous ceux qui, au sein de l'Union européenne, militent contre un rapprochement avec elle, au nom des ratés de sa démocratie et de son Etat de droit. La Turquie réagit à coups d'orgueil froissé à chaque difficulté venue de l'extérie