Menu
Libération

Le Bachkortostan, une PME au patron tyrannique. Rakhimov gère sans partage la petite république russe.

Article réservé aux abonnés
publié le 16 juin 1998 à 3h40

Oufa, envoyée spéciale.

Chaque jour, Kaderlie Emametdinov vient à son bureau et s'installe à sa machine à écrire. Son journal, Edel Oural, un hebdomadaire tatar d'opposition, n'est pas sorti depuis deux ans. Le dernier tirage a été saisi. Mais il ne perd pas espoir: «Je suis prêt au cas où on trouve enfin quelqu'un qui prenne le risque de nous imprimer.» Président du Bachkortostan (ex-Bachkirie), république de l'Oural membre de la fédération de Russie, Mourtaza Rakhimov, 64 ans, n'aime guère voir son pouvoir contesté. Les rares journaux d'opposition doivent être imprimés à l'extérieur du territoire. La dernière radio indépendante (Radio Titan) vient d'être fermée; son président risque cinq à dix ans de prison pour «insulte au chef de l'Etat», «appel à la rébellion», etc.

Elu en 1993, Rakhimov, ancien président du Soviet suprême local, a remis dimanche dernier son mandat «en jeu». Un simulacre d'élections. Le chef de l'Etat n'a admis qu'un «concurrent»: son obscur ministre de la Forêt. Les trois candidats d'opposition ont été invalidés par la commission électorale, à la botte du Président. Rakhimov, qui a été réélu sans surprise avec plus de 70% des voix, est un exemple de ces potentats locaux aux commandes dans de nombreuses régions russes. Cultivant son image de leader paternaliste, il gère le Bachkortostan comme son fief. Il s'appuie sur une administration soumise, organisée selon le vieux principe vertical, et sur une police omniprésente et bien payée.

Ami de Moscou. Formel