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Libération

L'Italie juge un crime «philosophique». Deux jeunes universitaires accusés d'avoir tué sans mobile.

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publié le 15 juillet 1998 à 6h05

Rome, de notre correspondant.

Brillants thésards en philosophie du droit, ils assistent depuis plusieurs semaines à leur procès, de manière intéressée quoique un brin distants: comme s'il s'agissait d'un simple exercice pratique. Une application de leurs constructions intellectuelles. Une sorte de jeu de rôles, où les experts en criminologie se glisseraient dans la peau d'un coupable. Mais pour Giovanni Scattone, 30 ans, et Salvatore Ferraro, 31 ans, le coût de cette expérience judiciaire risque d'être particulièrement élevé: la réclusion à perpétuité. Le procureur de Rome Carlo La Speranza les soupçonne en effet d'avoir tué, l'an passé, d'un coup de feu en pleine nuque, Marta Russo, une étudiante en troisième année de jurisprudence, à l'université La Sapienza. Sans mobile. Uniquement par défi. Celui de mettre en pratique les cours de droit qu'ils dispensaient en tant qu'assistants universitaires. «Scattone et Ferraro ont froidement décidé de se prouver à eux-mêmes qu'il était possible de tuer sans être découverts», a ainsi conclu dans son acte d'accusation le magistrat, pour lequel le soupçon du «crime philosophique» est corroboré par un séminaire tenu par les deux hommes au cours duquel ils avaient insisté sur l'équation: «Sans mobile et sans l'arme du crime, il n'existe pas d'homicide»" Aucun indice. Il est 11h42, ce matin du 9 mai 1997, lorsque, avec une amie, Marta Russo, 22 ans, s'apprête comme chaque jour à quitter l'enceinte de la faculté de droit de Rome. A peine a-