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Libération

Rabat refuse à Serfaty le retour au pays. Cette décision montre les limites de l'ouverture marocaine.

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publié le 17 juillet 1998 à 6h09

Il a lutté pour l'indépendance du Maroc, s'est vu infliger l'exil et

la prison par les autorités coloniales françaises. Puis, son pays devenu souverain, il s'est battu pour ses idées marxistes, d'abord au parti communiste, ensuite à la tête d'un groupuscule d'extrême gauche. Il est alors arrêté à plusieurs reprises par la police marocaine, sauvagement torturé, de même que sa fille, qui décède. Il plonge pendant deux ans et demi dans la clandestinité, mais se fait prendre en novembre 1974. En février 1977, il est condamné à la réclusion perpétuelle pour atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat. Il reste détenu à la prison de Kenitra jusqu'en 1991, au total pendant dix-sept ans, avant d'être libéré et, aussitôt, expulsé comme" Brésilien. Hier, saisie en recours depuis six ans, la Cour suprême à Rabat s'est déclarée «incompétente» pour statuer sur le fond, la nationalité de l'opposant. Ce faisant, elle a confirmé l'arrêté d'expulsion, qui contraint Abraham Serfaty, 62 ans, à l'exil en France.

D'un point de vue strictement juridique, la chambre administrative de la Cour suprême n'est, en effet, pas appelée à trancher des litiges de nationalité. D'un point de vue factuel, celle d'Abraham Serfaty ne souffre cependant aucun doute. Juif marocain, sa famille vit dans le royaume chérifien depuis l'exode collectif d'Espagne au XVe siècle. S'il est vrai que le grand-père, négociant d'hévéa dans l'Amazonie, avait pris la nationalité brésilienne, cette double nationalité, dont se prévalait