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Libération

Disparus algériens: l'appel au secours. Une poignée de parents tentent de sensibiliser l'Europe.

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publié le 22 juillet 1998 à 6h24

Sa femme, c'est la petite fluette assise dans un salon du Parlement

belge à Bruxelles. Son sourire s'allume de dents en or, ses poignets sont veinés du bleu pâle des tatouages. Houria (1) avait 15 ans et un foulard noué serré quand elle s'est mariée. «Lorsque l'on sortait ensemble, je pouvais la laisser sur le trottoir et elle restait figée sur place jusqu'à ce que je revienne la chercher, dit son époux. Elle avait l'habitude de vivre accrochée à moi.» Ils ont eu six enfants et un appartement dans un des «bons quartiers» d'Alger.

Puis, il y a eu ce 1er avril 1997. Lakhdar, le deuxième des garçons, celui qui est chirurgien, a disparu. La directrice de l'hôpital rassure le mari d'Houria. «Ils sont venus le chercher jusque dans la salle d'opération, devant un malade perfusé. Il est parti en blouse. Mais vous n'avez rien à craindre. C'étaient des policiers avec un mandat.» Le père a fini par aller au commissariat. «Ils m'ont renvoyé avec des insultes et des blasphèmes. Là, j'ai commencé à comprendre.» Aucun des collègues de Lakhdar ne veut témoigner sur l'arrestation. «Je ne leur en veux pas. Pour être franc, je ne l'aurais pas fait non plus», reprend-il. Les avocats déclinent poliment le dossier. Pendant des mois, le père n'ose bouger. «Je pensais que ce serait pire en faisant du bruit. Ils le tortureraient encore plus ou bien ils viendraient prendre mon autre garçon. J'avais peur aussi qu'ils me fassent chasser de mon travail. J'étais de ceux qui disent: "C'est le destin.»

Puis