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Libération

Des brebis dealeuses chez les amish. L'austère secte est sous le choc: deux des siens vendaient de la coke.

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publié le 23 juillet 1998 à 6h28

Ronks (Pennsylvanie), envoyé spécial.

«Dans chaque troupeau, il y a des brebis perdues. Dans chaque panier, quelques pommes pourries.» Isaac, qui demande de ne pas utiliser son vrai nom, comme il refuse de se faire prendre en photo, afin de ne pas commettre le péché d'orgueil, aime bien les proverbes. Ils font partie de son univers pastoral. Comme les vastes champs verdoyants de maïs ou de tabac, les prairies où paissent les vaches, les grandes fermes blanchies à la chaux et les charrettes noires ou grises qui défilent devant son porche au rythme trottinant et apaisant des sabots des chevaux qui les tirent. Paradis terrestre. A chaque occupant, Isaac adresse un signe imperceptible de reconnaissance. Il les connaît tous. Et ils lui ressemblent tous. Mêmes vêtements rustiques de toile noire, bretelles sur une chemise sans col, et chapeau de paille à larges bords qui protège un visage encadré par la même barbe en collier. A l'arrière-plan, une femme, robe longue, tablier et fichu, étend le linge. On peut croire avoir pénétré dans un tableau de Georges de la Tour ou Vermeer.

Soudain, ce calme idyllique est rompu par le rugissement d'une moto de grosse cylindrée qui déboule sur la route étroite et dépasse une charette à cheval. Harley Davidson contre Amish: l'allégorie n'échappe pas plus à Isaac qu'aux 20 000 autres membres de cette secte anabaptiste. Les Amish ont fait du comté de Lancaster, en Pennsylvanie, où ils vivent depuis le XVIIIe siècle, une sorte de paradis terrestre où