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Libération

Eau rage, eau désespoir à Hébron. Israël contrôle les ressources et la distribution, assoiffant les Palestiniens.

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publié le 25 août 1998 à 8h15

Hébron, envoyé spécial.

Nayef Zeblah appelle son fils et l'attrape par le mollet. «Regardez comme ses jambes sont noires!, s'écrie-t-il en soulevant sa culotte courte. Dis-lui au monsieur quand tu as pris une douche pour la dernière fois.» Walid, 4 ans, répond les yeux baissés devant ses onze frères et soeurs hilares: «Il y a très longtemps"» Le père, assis près d'un piano, désigne le carrelage crasseux et les plantes vertes mourantes. L'arrivée d'eau se trouve près de l'entrée, à même le sol. Rien ne sort du robinet. Pas une goutte, pas même un gargouillis annonciateur d'une coupure récente. «Cela fait trois mois que ça dure.» Toutes les maisons des environs sont logées à la même enseigne. Le quartier, baptisé Moscou à cause d'un monastère russe dressé au sommet de la colline, disparaît sous la poussière. Même les figuiers, habitués à la sécheresse, donnent des signes de fatigue. Depuis le début de cet été brûlant, le plus chaud de ces trente-cinq dernières années, Hébron la Palestinienne est assoiffée. Il n'y a plus assez de pression dans les tuyaux. L'eau ne gravit pas les côtes abruptes de la ville et s'écoule tout juste dans les replis de la vallée alors qu'elle afflue dans la colonie voisine de Kyriat Arba. A quelques kilomètres de distance, les uns arrosent leurs pelouses comme si de rien n'était et les autres ne peuvent pas se laver. Nayef Zeblah possède une vieille citerne creusée sous la terrasse. Son salaire de tailleur ne lui permet pas de la remplir. Au fond d