Il est parfois difficile d'imaginer que la France vit en
cohabitation. On pouvait l'oublier, hier à l'Elysée, en entendant Jacques Chirac brosser un tableau de la politique étrangère française en rendant un hommage appuyé au ministre des Affaires étrangères, Hubert Védrine (dont il reprend au passage certains concepts), ou en soulignant que «le président de la République, le Premier ministre et le gouvernement mobilisent leurs efforts» pour «affirmer l'identité et défendre les intérêts de la France, bâtir une Europe unie, puissante et prospère»" Le consensus est tel que, lors de la Conférence annuelle des ambassadeurs de France qui s'est ouverte hier, Lionel Jospin a même renoncé à prononcer un discours public, préférant une séance de travail à huis clos avec les diplomates" Le Premier ministre, qui s'était exprimé l'an dernier, n'a visiblement pas de «différence» à faire entendre.
Il faut dire que sur tous les sujets qui auraient pu fâcher, Jacques Chirac a évolué. L'eurosceptique d'hier a cédé la place à un Président qui ne jure plus que par l'Union européenne, proposant même, hier, la création d'un Conseil des ministres de la Défense des Quinze. L'héritier de la vision gaulliste en Afrique s'est rallié, au moins en parole, à la démocratisation et à la fin de l'ingérence. Enfin, même sur un sujet sur lequel il s'était maladroitement exprimé, comme le relativisme culturel en matière de droits de l'homme, le voilà revenu à une «universalité» plus conforme au pays où fut signé