Naples envoyé spécial
Malgré sa jambe blessée et ses deux béquilles, Gennaro Quarto s'agite comme un cerbère dès qu'il passe devant le porche de l'archevêché de Naples et aperçoit des journalistes. «C'est un scandale, le cardinal est innocent, il a toujours dispensé le bien», apostrophe-t-il, encore incrédule une semaine après que la brigade financière eut frappé à la porte de «monsignor Giordano» à la recherche de preuves confirmant les graves accusations portées contre celui-ci. A savoir: usure, extorsion et association de malfaiteurs. Stupeur et mutisme. Des soupçons tellement accablants qu'un peu plus loin, devant le dôme attenant à l'archevêché, les fidèles optent quasi unanimement pour le mutisme et le recueillement, sans toutefois parvenir à dissimuler stupeur et consternation. «Nous prions, nous prions pour le cardinal, glissent furtivement deux jeunes franciscaines sur le parvis de la cathédrale. C'est une épreuve très dure à supporter.»
Epreuve d'autant plus terrible que Mgr Giordano, 67 ans, archevêque de Naples depuis 1987, était jusqu'à présent réputé pour son franc-parler et ses vibrantes homélies contre le crime organisé, n'hésitant pas à jeter l'anathème sur les camorristes et à promettre l'excommunication aux usuriers. «L'usure est un péché à peine moins grave que l'homicide», répétait encore publiquement en mai le prélat, à l'adresse d'un Mezzogiorno en proie à cette pratique séculaire. «C'est un fléau très diffus», confirme le jésuite Massimo Rastrelli, pr