Pékin, de notre correspondante.
Quoi de plus efficace qu'un désastre naturel pour rallier une nation? Il y eut assurément des inondations graves en Chine au cours de cet été 1998. Dont il sera sans doute difficile d'évaluer le coût réel en pertes humaines (lire ci-contre). Mais la propagande chinoise en offrant à cette catastrophe une couverture médiatique gigantesque et orchestrée a modifié sa portée. Les inondations sont devenues l'enjeu d'une bataille nationale d'un peuple et de son armée ressoudés contre un ennemi naturel: l'eau. En mobilisant la population, les autorités sont parvenues au tour de force de retourner la catastrophe à leur avantage. Pour dissimuler d'autres problèmes, qu'il s'agisse des insuffisances de gestion des terres, qui rendent la Chine plus vulnérable aux inondations, du ralentissement économique induit par la crise asiatique ou de la montée d'un extrémisme islamique dans la province du Xinjiang.
Sans relâche, la télévision et la presse ont montré la bravoure des soldats, évitant les scènes qui dérangent, comme celles des corps flottant ou des réfugiés, les rumeurs achevant de magnifier les exploits. L'armée s'est trouvée propulsée au zénith. Un lifting dont elle avait bien besoin. Depuis l'intervention sanglante des chars sur la place Tiananmen de Pékin, qui mit fin au printemps démocratique de 1989, son image n'a cessé de se dégrader. La population a reproché également la corruption grandissante des militaires, qui ont développé au cours des année