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Libération

La ville congolaise est depuis six semaines aux mains des rebelles. L'étrange paix de Bukavu. La population reste tiède à l'égard du nouveau pouvoir.

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publié le 15 septembre 1998 à 9h37

Bukavu, envoyé spécial.

Sur l'avenue centrale du quartier Ngonba, un rouleau-compresseur nivelle au ralenti un tronçon de macadam tout frais. Au-delà, les rares véhicules circulant dans Bukavu retrouvent le mauvais goudron mangé par le temps et les pluies. D'ailleurs, rouler pour quoi faire? «Tout est mort ici. Même s'il n'y a pas de couvre-feu, chacun évite de sortir. A la tombée de la nuit, ce sont les militaires qui font leurs affaires», dit Jean-Petit, chauffeur de taxi. Six semaines après son passage sous contrôle des forces rebelles, la capitale du Sud-Kivu, avec son demi-million d'habitants, observe avec circonspection ses nouveaux maîtres, dont elle ne sait s'ils viennent de la conquérir ou de la libérer.

Bukavu, par prudence, se couche tôt mais commence à élever la voix. Pour Honoré, patron du bar bien nommé Ici ça va 5 sur 5, justement, ça ne va très fort: «Le premier jour de la rébellion, les banques, la radio et la poste ont été occupées. Il y a eu des déclarations à la radio, des tirs le lendemain, et voilà la rébellion a gagné. Il faut croire que nos chefs militaires ont trahi.» De fait, les soldats congolais, y compris ceux de la «détection militaire des activités antipatrie» ont rallié, pour l'essentiel, la rébellion. Ils ne sont pas seuls. A la mairie, au siège du gouverneur comme à la police, tous les responsables sont des Congolais, souvent en place avant l'arrivée des rebelles. Les membres de cette administration-vitrine peinent à convaincre les habitants d