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Libération

Bangladesh: la malédiction des eaux. La plus grande crue du siècle a fait 900 morts et 30 millions de réfugiés.

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par Régis NUSBAUM
publié le 16 septembre 1998 à 9h27

Dacca, envoyé spécial.

Le regard résigné, Abdel Kader fait un geste de la main vers le sol. Fiévreuse, sa fille de 15 ans repose allongée sur une vieille couverture en compagnie de ses trois autres enfants. Abdel Kader et sa famille vivent depuis deux mois dans une salle du collège Notre-Dame transformée en dortoir de fortune. Quelques mètres carrés pour dormir et entreposer les objets qu'ils ont pu sauver des eaux. Un pot en fer-blanc, deux verres, un sac en jute et quelques vêtements. «On a laissé tout le reste là-bas, explique Abdel Kader. Dans notre maison à Manda, au sud de Dacca. Aujourd'hui, l'eau arrive jusqu'au plafond et tout est resté en dessous.»

Abdel Kader est un chauffeur rickshaw. Habituellement, il pédale toute la journée pour transporter ses clients et gagner 90 takas (12 F) par jour. De quoi nourrir sa femme et ses enfants et payer le loyer de leur petite maison en bambou et en tôle. Mais depuis les inondations, Abdel Kader n'est pas remonté sur son rickshaw. «Je n'ai rien gagné depuis deux mois», dit-il.

«Une maison à nous». Tout autour, une vingtaine d'autres familles sont installées sur des nattes jetées sur le sol. Des hommes torses nus, des femmes enveloppées dans leurs saris usés et des enfants nus. Quelques tissus pendent sur une ficelle accrochée entre le tableau noir et une fenêtre. «Tout ce qu'on veut, c'est une maison à nous et un peu d'argent pour le mariage de notre fille, ajoute Abdel Kader. On a besoin d'aide mais on va devoir se débrouiller