Jéricho, envoyé spécial.
Imaginez un Las Vegas en Terre sainte, un immense paquebot rutilant échoué sur un sol aride et parsemé de vieilles pierres. Là où, selon la légende, le Christ a échappé trois fois à la tentation, là où les trompettes de Josué ont mis à bas les remparts, se dresse un bâtiment de verre fumé et de béton, surmonté de frises pharaoniques, un temple dédié à l'amusement, au hasard et à l'argent. Le démon du jeu vient de gagner, à son corps défendant, la ville la plus ancienne du monde. Le casino, qui a tout juste ouvert ses portes, s'appelle l'Oasis. C'est un vaste tapis vert perdu au milieu d'un paysage lunaire et désertique, un îlot de luxe et de plaisirs dans une région qui en manque cruellement. Entouré de barreaux et défendu par une armée de gardiens, il se tient à l'écart de la palmeraie et évite le contact avec la population locale. Le visiteur n'a pas besoin d'entrer dans Jéricho et remarque à peine sur le bas-côté de la route les maisons en torchis et délabrées du camp de réfugiés d'Aqabat Jaber.
Des dizaines d'ouvriers s'activent sous un soleil écrasant parmi les échafaudages. Ils enlèvent le coffrage du portique et jettent les fondations d'un hôtel cinq étoiles. Un autre palace est prévu, ainsi qu'un centre de conférences, des courts de tennis et un golf dix-huit trous. Les opérateurs autrichiens, pressés d'engranger les premiers bénéfices, n'ont pas voulu attendre la fin des travaux. La cérémonie s'est déroulée hier soir, à huis clos. Claudia Schi