Vottem envoyée spéciale
A chaque annonce de manif, c'est toujours la même trouille qui monte. Dans le «centre fermé pour illégaux» de Vottem, près de Liège, le directeur Jean-François Jacob attend derrière les rangées de gendarmes. De l'autre côté des grilles, plus de 5 000 manifestants, un record, commencent à arriver en criant: «Non aux camps pour étrangers!» Prévu depuis longtemps, le défilé d'hier a pris une autre dimension depuis qu'une jeune Nigériane, Semira Adamu, est morte lors de son expulsion forcée par la gendarmerie belge le 21 septembre dernier, provoquant une vague d'indignation dans le pays et la démission d'un ministre. En attendant son expulsion, Semira était détenue dans un centre comme celui de Vottem dont la mise en service est prévue dans quelques mois.
Désistements. A l'annonce de ce décès, Jean-François Jacob a rassemblé le personnel qui venait tout juste d'être recruté. Il a dit: «On ne doit pas se sentir honteux. C'est pas vous qui l'avez tuée. Cela ne s'est même pas passé dans le centre.» N'empêche que le lendemain, deux ou trois nouveaux embauchés ne se sont pas présentés, sans explication, alors qu'ils avaient été 2 900 à se bousculer pour décrocher une cinquantaine de postes. Jean-François Jacob a 34 ans et se trouve une tête de «type en première ligne». «Mais j'assume les regards de plein fouet. J'assume les gens en face qui me traitent de facho. Enfin, quand même, ça fait drôle.»
Dans les années 90, en effet, la Belgique se lance sans complexe,