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Libération

Lovanium, campus en ruines à l'image d'un pays déliquescent. A l'université de Kinshasa, les étudiants vivent de débrouille dans des locaux délabrés.

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publié le 6 octobre 1998 à 13h29

Kinshasa, envoyé spécial.

C'était en mars 1954 à Léopoldville (aujourd'hui Kinshasa), Papa Wendo triomphait au Congo Bar avec la chanson Marie-Louisa. Le premier passager noir descendait la passerelle d'un DC3 à l'aéroport en provenance de Lubumbashi. Il portait une chemise blanche, une cravate noire, un pantalon gris, il était le premier étudiant noir en mathématiques du Congo belge. Il s'appelle Aubert Mukendi et raconte: «L'université de Louvain venait d'ouvrir le campus de Lovanium dans la capitale. Elle avait demandé aux régions d'envoyer leur meilleur élève. Je terminais mes humanités à l'institut Saint-Boniface. Mon père était le premier "évolué de Lubumbashi, il parlait même un peu français, j'avais donc acquis un petit avantage et j'ai représenté le Katanga.» Il rejoignait 32 étudiants, parmi lesquels Etienne Tshisekedi, le charismatique leader de l'opposition, et d'autres futures personnalités zaïroises.

De la ville, une piste de terre montait au campus de Lovanium, où les bâtiments de l'école et du couchage, voisinant autour d'une pelouse, étaient entourés des maisons des professeurs belges. «L'université avait loué une quinzaine de vélos. Pour aller rigoler à la Cité (les quartiers africains), nous déambulions par deux à califourchon.» Aujourd'hui, un cycliste se tuerait dans la descente de Lovanium, défoncée, inondée, encombrée durant l'année de 15000 étudiants transpirant dans la moiteur et la poussière. Brillant élève, «sauf en dessin industriel, à cause des gro