Les dignitaires étaient sous les lambris, au Palais-Bourbon, les
contestataires dehors, dans la rue. Hier, premier chef d'Etat de l'Afrique subsaharienne à recevoir cet honneur, le président sénégalais Abdou Diouf s'est adressé à l'Assemblée nationale française. A priori, rien de plus normal: des députés sénégalais ont siégé de 1914 à 1959 dans le travées du Parlement français, de Blaise Diagne au «poète-président» Léopold Senghor en passant par Lamine Gueye.
Lié à la France par une histoire qui remonte aux quatre «communes» sur la côte occidentale de l'Afrique, le Sénégal a été le premier pays du continent à pratiquer le multipartisme, sans alternance certes, mais aussi sans président à vie. En 1981, Senghor a cédé sa place à Diouf, Premier ministre depuis dix ans. Or, c'est là où le bât blesse: le chef de l'Etat, qui a dit hier tout ce que l'on voulait entendre, à l'Elysée et à Matignon, sur les droits de l'homme, la francophonie, l'ajustement structurel, le maintien de la paix en Afrique, l'intégration régionale et la «nouvelle» politique française de coopération, est accusé chez lui de s'installer à demeure au pouvoir. Sa majorité a abrogé en mai la limitation constitutionnelle des mandats présidentiels, ouvrant la voie à une réélection en l'an 2000. Diouf sans fin?
Derrière le Palais-Bourbon, cantonnée dans un square, l'opposition sénégalaise a donné de la voix. «Nous prenons à témoin l'opinion française», a dit l'ex-ministre Amath Dansokho, entouré de vingt-sept parlemen