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Libération

Laura Isabel, miraculée du cyclone. Après six jours de dérive, cette femme a été repêchée au large du Honduras.

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publié le 14 novembre 1998 à 14h10

Trujillo, envoyé spécial.

Elle est là, prostrée sur un canapé, comme sous le choc d'un malheur qui la dépasse. Le regard absent, imperméable au monde extérieur. D'une longue jupe noire, dépassent des jambes pelées, érodées par le sel de la mer. Laura Isabel Arriola, institutrice de 36 ans, ne veut pas parler. Ou ne peut pas. De longues minutes s'écoulent. Son beau visage noir se rehausse un tantinet: «C'est grâce au miracle de Dieu si je suis encore en vie. Je devrais être morte à l'heure qu'il est.»

Puis d'une voix caverneuse, elle entame le récit de son naufrage. Tout commence le 29 octobre, dans son village de Santa Rosa de Aguan: une pluie diluvienne s'abat sur la côte hondurienne de la mer des Caraïbes. «Le lendemain, les pluies ont redoublé de violence, tombant sans répit. Puis, au milieu de la nuit, l'ouragan est arrivé. Vers 1 heure du matin, les murs de notre maison ont commencé à trembler, l'eau entrait partout. Mon mari nous a emmenés, moi et les enfants, sur le toit. Comme la maison allait s'écrouler, nous nous sommes réfugiés dans celle d'un voisin. L'ouragan en est aussi venu à bout et, je ne sais pas comment, nous nous sommes tous retrouvés à l'embouchure du fleuve Aguan. Nous nous sommes hissés sur un promontoire de sable en nous cramponnant à des bouts de bois.»

La furie des eaux l'emporte sur leur résistance. Les naufragés ne se repèrent plus, entre fleuve et mer. Le déluge leur a déjà fait perdre de vue le village et les grappes de gens qui agitent leurs