Ils se présentent tels qu'ils sont. Vêtus de ponchos, sacs en
bandoulière et longs cheveux noirs laissés libres. Tout juste une paire de baskets contre le froid de l'hiver. Impassibles, Miguel et Ignacio, les deux Indiens Kogis, n'avaient encore jamais quitté leurs montagnes du nord de la Colombie. «Leur voyage n'est pas une partie de plaisir, mais un travail», précise leur interprète. Le chaman d'une cinquantaine d'années et son jeune compagnon ont été choisis pour représenter les Indiens Kogis auprès de la France et de la Belgique. Pendant dix-huit jours, au ministère de l'Environnement à Paris, au monastère bouddhiste de Karma-Ling, à Grenoble, ou devant l'Union européenne, à Bruxelles, ils vont tenter de recueillir les fonds nécessaires à l'achat de nouvelles terres. Une opération baptisée «Tierra», soutenue financièrement par le ministère français des Affaires étrangères.
Terres froides. D'emblée, Miguel et Ignacio évoquent les invasions successives de ceux qu'ils appellent les «petits frères». «Lorsqu'ils sont arrivés sur nos côtes, les conquistadores nous ont recouverts de sacs en plastique et mis des yeux en verre: ils ont voulu nous changer. Pourtant, nous sommes encore là.» Des 500000Indiens Tayronas dénombrés au XVIe siècle, on ne compte aujourd'hui que 25000 descendants, dont 11000 Kogis. Officiellement, ils vivent dans une réserve de 325 000 hectares sur les contreforts de la Sierra Nevada de Santa Marta. Cernés, les Kogis se voient de plus en plus cantonnés sur