Amman, envoyé spécial.
Si les téléspectateurs arabes ont assisté, aussi impuissants que furieux, au bombardement de l'Irak, ils ont au moins eu la satisfaction de suivre les événements ailleurs que sur CNN, perçue comme un porte-parole de l'administration américaine. Pendant la guerre du Golfe de 1991, ceux qui voulaient échapper à la couverture politiquement verrouillée et techniquement archaïque des chaînes officielles arabes n'avaient d'autre choix que de se brancher sur la chaîne américaine d'information en continu. Maintenant, ils ont Al-Jézira, la chaîne qatarienne d'information par satellite. En deux ans, Al-Jézira s'était taillée une solide réputation de professionnalisme et de liberté de ton, mais l'opération Renard du désert en a fait un acteur incontournable. C'est en effet sur cette chaîne que Saddam Hussein a appelé les masses arabes à combattre contre les Etats-Unis, briser l'embargo et secouer le joug de leurs gouvernants.
Dix-sept heures par jour, la chaîne a diffusé reportages, analyses, interviews et débats, monopolisant l'audience dans la plupart des foyers équipés d'une antenne satellite, ainsi que dans les cafés et restaurants, particulièrement fréquentés pendant les nuits du ramadan. A l'instar de Christiane Amanpour, l'envoyée spéciale vedette de CNN, les journalistes d'al-Jézira présents à Bagdad sont intervenus régulièrement en direct pendant les bombardements. Les images nocturnes de la capitale irakienne sous les bombes ont eu un impact parti-culière