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Libération
Reportage

Somalie: Mogadiscio, port fantômeLes seigneurs de guerre se disputant la capitale, le business s'est déplacé plus au sud.

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publié le 26 décembre 1998 à 17h39

Mogadiscio envoyé spécial

Minuscule tache noire à l'horizon, le cargo passe au large de Mogadiscio, de son port interdit, de ses seigneurs de la guerre et de leurs canons. Sur la jetée, Abdel Ahmed lui jette à peine un regard. Depuis trois ans, aucun bateau n'a accosté. «J'ai passé vingt et un ans dans la police du port depuis son inauguration en 1977. J'aurai connu la paix, la guerre, et maintenant, l'attente.» Depuis le départ de la mission de l'ONU de la capitale somalienne en 1995, les chefs de faction n'ayant réussi ni à vaincre ni à s'entendre, le port, à portée d'artillerie, est paralysé.

Abdel Ahmed tue le temps. On le trouve à l'entrée, sous le tamarinier du restaurant Durdur où Fatuma sert des petits verres de thé aux gardes du port fantôme qui mâchent le khât. Au Durdur, aussi, on attend les bateaux. «Ce jour-là, dit Fatuma, nous pourrons vivre. Il y aura des marins, des transporteurs, des commerçants, tout un tas de gens à protéger, ce sera comme avant.» Un port en activité, c'est l'ouverture garantie d'un robinet de taxes, notamment celles prélevées au titre de la «sécurité», le racket le plus profitable en Somalie.

«Administration conjointe». Or, depuis 1995, cette manne est dérivée vers El-Maan, au nord, et Merca, au sud. Ces deux beach ports qui débarquent les marchandises ou embarquent le bétail à même le sable de leurs plages ont pris le relais de la capitale. Direction Dubaï, l'Egypte ou Mombasa, au Kenya. Pourtant, aucun des ports de plage n'est parfaitemen