Le 2 décembre 1956, Fidel Castro et 81 compagnons d'aventure
embarqués au Mexique à bord du Granma, un yacht de location à bout de souffle, s'échouent piteusement près du cap Cruz, au sud de Cuba. Une vingtaine d'hommes à peine échappent aux balles ou au coup de grâce des soldats à leurs trousses. Le dictateur Fulgencio Batista crie victoire, il a tué dans l'oeuf la tentative de débarquement, et l'arrestation de Castro n'est qu'une affaire de jours. Deux ans plus tard, soit sept ans après son coup d'Etat, l'ancien sergent s'apprête à boucler ses valises pour l'exil. Il a échoué à reprendre la Sierra Maestra, la cordillère montagneuse du sud du pays, que les rescapés ont transformée en bastion inexpugnable. Castro, fort désormais d'une armée de quelque 2500 guérilleros, est devenu le chef incontesté de la rébellion: le 20 juillet 1958, il a été désigné à Caracas «commandant en chef» des forces militaires du Front révolutionnaire démocratique, coalition des mouvements d'opposition à Batista, et de son parti, le M-26 (mais les communistes n'en sont pas). Le 18 août, il décide l'offensive finale. Il ordonne à Camilo Cienfuegos et à Che Guevara de quitter le sanctuaire montagnard pour s'infiltrer avec leurs colonnes respectives, 328 hommes au total, dans la province de Las Villas, dans la région centrale. Objectif: couper les voies de communication et bloquer les éventuels renforts de La Havane vers le sud, où Fidel veut prendre lui-même Santiago, la deuxième ville du pays, là où