Bassorah envoyé spécial
En Irak, toutes les nostalgies mènent à Bassorah, ville du Sud, au bord du Golfe, au coeur d'une palmeraie tropicale. Elle doit à sa proximité avec l'Iran et le Koweït, à une cinquantaine de kilomètres chacun, sa splendeur d'hier, et sa malédiction d'aujourd'hui.
La route rectiligne qui y mène traverse un désert de pierrailles. Elle est bordée de bourgades de terre cuite et encadrée de fortins blancs décorés, où se dissimule un tank ou une automitrailleuse. Plus elle approche Bassorah, plus se succèdent ces fortins, des camps de toile kaki et des barrages de police aux intersections avec les pistes des villages. A Al-Daïr, à une vingtaine de kilomètres de Bassorah, un bouquet de drapeaux multicolores décore la porte du bâtiment du parti Baas. Son chef régional, un militaire, explique que ces drapeaux des tribus témoignent, depuis les raids américains, de leur allégeance au régime. Le cheikh de la tribu Al Sadah-Batat reçoit les étrangers avec les agréables rites de l'hospitalité arabe, dans un magnifique pavillon de roseaux tissés, entouré des hommes de sa famille. Derrière, dans le village empuanti d'eaux saumâtres et d'ordures que sillonnent les silhouettes furtives de femmes et de gamins footballeurs maigrichons, stationne une automitrailleuse de la milice.
Femmes voilées. Une puanteur latente de pétrole, puis la fébrilité de faubourgs surpeuplés, précèdent l'arrivée sur l'avenue principale, où trois choses sautent aux yeux. Toutes les femmes portent