Gibraltar envoyé spécial.
«Moi, je me fiche bien de la politique. Que Gibraltar soit souverain ou qu'on plante un drapeau espagnol sur le haut de son rocher, ça ne me fait ni chaud ni froid. Je veux juste que tout le monde trouve un arrangement pour que je puisse garder mon emploi.» Derrière son beau sourire de femme mûre, Liliana ne peut réprimer un rictus d'appréhension. «Tout ce que je possède, je le dois au Peñon Gibraltar, pour les Espagnols. Ma voiture, mon appartement, les emprunts à la banque et mes bijoux" On m'a donné le droit d'être coquette.» Et d'exhiber un pendentif et quelques bagues en argent, obtenus au rabais dans la bijouterie où elle travaille, au beau milieu de Main Street, le grand axe touristico-commercial de Gibraltar. Chaque soir, pour regagner ses pénates, elle quitte ce havre de prospérité pour rejoindre la linea de la Concepcion, informe traînée urbaine «sans passé, sans présent ni avenir», dit Liliana , qui, avec ses 64% de chômeurs, fait partie de l'une de ces zones de perdition de l'Andalousie espagnole. Entre ces deux points, une ligne de démarcation: the border pour les Gibraltariens; la verja la «grille» pour les Espagnols. «Cette frontière, c'est devenu un cauchemar! Un beau jour, elle va bien finir par nous faire perdre notre emploi, à tous les travailleurs espagnols de la linea!» Blocus de pêcheurs. Depuis une quinzaine de jours, ce sont des heures d'attente, de fouilles, de harcèlement de la guardia civil espagnole. Désormais,