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Libération

Cocaïne, nouvelle plaie haïtienne. Le chaos politique dans l'île facilite le trafic de drogue en plein essor.

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publié le 17 mars 1999 à 0h10

Port-au-Prince, envoyé spécial.

Le poisson se fait rare dans la région de Jacmel. Non que la mer soit particulièrement mauvaise, ou que la pollution eût achevé l'agonie des coraux. C'est en réalité la faute aux pêcheurs qui ont trouvé une activité plus lucrative que de taquiner la sarde ou la langouste. Depuis quelques mois, leurs filets relèvent des paquets de cocaïne pure. Une pêche miraculeuse: la drogue est rachetée 2000 dollars le kilo par un grossiste de la petite ville qui la restitue à ses légitimes propriétaires, les représentants locaux des cartels colombiens, installés à Port-au-Prince.

Quelques pêcheurs acheminent eux-mêmes la poudre vers la République dominicaine voisine, d'où celle-ci sera expédiée vers sa destination finale, les Etats-Unis, via Porto-Rico. Les gains sont plus élevés (3000 à 6000 dollars le kilo, murmure-t-on), mais il y a des risques. Au début du mois, une femme a été tuée dans le tap-tap (camionnette-taxi) qui la conduisait à Seguin, dans la montagne. Elle transportait trois kilos de cocaïne. On entend parfois des fusillades la nuit, comme lors du coup d'Etat militaire (1991). Mais la tentation est trop forte. Au pays le plus pauvre des Amériques, un heureux coup de filet ramène dix ans du revenu moyen par habitant.

Point de transit. Jacmel se trouve exactement en face de la Colombie, sur la mer des Antilles, et la côte est quasiment sans surveillance. Les trafiquants larguent de nuit leur cargaison et filent hors des eaux territoriales. Leurs c