Kosovo Polje, envoyé spécial.
Le «Marko Bar» est une cambuse comme on en trouve dans les Balkans. Pièce minuscule, tout juste une cabane à outils. Quatre tables en Formica, recouvertes de napperons à la fraîcheur douteuse. Une atmosphère enfumée où se mêlent les vapeurs d'alcool de prune et l'arôme caramélisé du café bouilli au feu de bois. A deux pas de la gare, non loin du commissariat, soldats et policiers en ont fait leur cantine. Et ils sont nombreux qui portent l'uniforme à Kosovo Polje. Dans ce bastion du nationalisme serbe au nom chargé d'histoire, chaque homme en âge de combattre a reçu son paquetage. Réguliers, miliciens ou réservistes, la mobilisation est générale.
Ancêtres. Tassés sur les banquettes, leurs fusils suspendus aux dossiers des chaises, les habitués du bar ont le regard fatigué des guerriers. Les discussions sont graves. Les toasts un peu trop solennels. Ambiance de veillée d'armes. Avec le départ annoncé des vérificateurs de la mission internationale au Kosovo, les semaines à venir s'annoncent martiales. Personne, toutefois, ne semble impressionné par les menaces occidentales de frappes aériennes. «On nous a souvent promis la fessée, mais nous ne sommes plus des enfants, grimace Igor, policier de son état. Vos pays feront ce qu'ils voudront, cela n'a guère d'importance. Le Kosovo est une terre serbe. Ma famille est enterrée ici depuis des siècles et des siècles. Quoi qu'il arrive, comme mes ancêtres, je mourrai sur cette terre.» A une table voisine, u