Dans son bureau de la Cour des comptes, à Paris, Pierre Lelong, 67
ans, l'un des cinq membres du «comité d'experts indépendants» qui a contraint la Commission européenne à démissionner, n'est pas homme à mâcher ses mots. Pour cet ancien député gaulliste, qui présida la Cour des comptes européenne de 1981 à 1985, aucun des vingt commissaires actuels ne devrait retrouver son siège dans le futur exécutif. Entretien.
Jacques Santer s'est dit «choqué» par la tonalité de vos conclusions, qu'il «récuse», notamment quand elles dénoncent l'irresponsabilité de la Commission" S'il récuse nos conclusions, pourquoi a-t-il démissionné et frustré l'opinion publique d'un débat devant le Parlement? Je ne m'attendais d'ailleurs pas à cette débandade de la Commission, qui a démissionné sans même prendre le temps de lire attentivement le rapport.
Plusieurs commissaires à qui vous n'avez rien reproché estiment qu'ils ne sont pas responsables des dérapages que le comité dénonce.
La responsabilité collective, cela existe. Lorsque les commissaires décident de donner une poignée d'argent pour éloigner honorablement un directeur général alors qu'il aurait sûrement mérité une enquête administrative et probablement une procédure disciplinaire, on est collégialement responsable. Lorsqu'il s'avère que la plupart des irrégularités que nous avons relevées ont bénéficié d'un visa favorable du contrôle financier, on est collégialement responsable. Quand on n'est pas capable de redéployer les effectifs existants