Province du Henan, envoyée spéciale.
Scène ordinaire de la campagne chinoise. C'est l'heure du dîner chez les Zhang: une famille de paysans qui vit dans un hameau d'une centaine de maisons, près d'un affluent du fleuve Bleu, au centre de la Chine. Eclairés par un mauvais néon, dans la pièce principale, les hommes mangent, assis autour d'une petite table, en discutant, fumant et buvant de l'eau de riz fermentée. Autour d'eux, dans la pénombre, les femmes, qui ont préparé le repas, les observent, debout en silence. Lorsque leurs fils, frères et maris se lèveront, elles finiront les bols. Il leur restera surtout du zhou, la bouillie de riz qu'elles agrémenteront d'un peu de légumes salés. C'est ainsi depuis des millénaires. Les Zhang ne sont ni pauvres ni riches. Des paysans moyens, qui ont des contacts avec les petites villes de la région. Deux des fils sont même allés travailler à Shanghai pendant trois ans. Mais la situation de la femme dans les zones rurales un peu reculées est restée celle d'un être de second rang. Bonne à reproduire, si possible des héritiers mâles, rude à la tâche et fidèle à son mari. Un demi-siècle de communisme, en dehors de la période de vie collective (1950-80), n'a guère changé les traditions, qui sont revenues.
500 tentatives par jour. Ce qui est nouveau, en revanche, c'est cette épidémie tragique qui atteint depuis quelques années les femmes de la campagne: les tentatives de suicide. Le phénomène est devenu tellement important qu'il a suscité une