Menu
Libération

GUERRE AU KOSOVO : «Dans un champ, j'ai vu les morts». Des réfugiés témoignent de tueries à Dakovica, mardi, dans l'ouest du Kosovo.

Article réservé aux abonnés
publié le 29 avril 1999 à 0h49

Kukës, envoyée spéciale.

La première fois que Vjollca a voulu fuir le Kosovo pour se réfugier en Albanie, les militaires serbes lui ont barré la route. Elle est retournée dans son village, près de Dakovica. Sa maison était brûlée. La seconde fois, elle était sur la route quand le convoi a été bombardé. Au milieu des restes calcinés, les Serbes l'ont plantée devant une caméra et lui ont fait dire que l'Otan était responsable de la mort de ses amis. La troisième fois, c'était mardi après-midi.

«Ils ont pris mon fils.» Vjollca est enfin passée en Albanie, mais elle a perdu sa raison de vivre. «Nous étions à Meje, à l'entrée de Dakovica. Ils ont d'abord pris le jeune chauffeur de notre tracteur et ont crié: "Il y a pas un vieux pour conduire? J'étais dans la remorque avec mes filles et mon fils. Ils ont pris mon fils. Puis dans l'autre tracteur derrière nous, ils ont pris mon mari. Ils les ont mis avec les autres. Ils nous ont ordonné d'avancer. Nous avons obéi. Nous pensions nous arrêter un peu plus loin pour les attendre. Je me disais qu'on allait juste les interroger. Et puis dans un champ, à droite, j'ai vu les morts. J'ai regardé en arrière, j'ai voulu descendre mais la police m'a repoussée.» La tête enfouie dans son vieux blouson, Vjollca sanglote: «Je voulais rester. Sans eux, je ne peux pas vivre.» Son fils avait 17 ans, son mari, 42 ans.

Depuis mardi, les Serbes laissent à nouveau passer les réfugiés par centaines. Depuis, il en serait arrivé plus de 5 000, selon les or