Londres de notre correspondant.
Fossilisé sous Victoria, gelé sous Thatcher, le très vieux Royaume-Uni a pris hier un sacré coup de jeune. En faisant élire des Parlements et des gouvernements largement autonomes en Ecosse et au pays de Galles, après l'Irlande du Nord, Tony Blair réinvente la citoyenneté britannique et refond la Constitution de son pays. «New Labour, New Britain», comme le dit le slogan un peu vantard du jeune Premier ministre. Le puzzle britannique fait de trois pays, l'Ecosse, l'Angleterre et le pays de Galles, et d'une province divisée, l'Irlande du Nord, est définitivement et fondamentalement métamorphosé. L'Angleterre et Londres doivent désormais partager le pouvoir avec Belfast, Cardiff et Edimbourg, et la Grande-Bretagne rejoint ainsi le concert des Etats européens qui savent qu'identités et pouvoirs nationaux doivent se négocier et se découpler.
L'ambition de Blair. Pour la Grande-Bretagne, au moins aussi centralisée que la France, le pari était risqué. Beaucoup, y compris au sein du Parti travailliste, redoutaient que le Meccano constitutionnel engagé par Tony Blair inspire sécessionnistes et nationalistes, et finalement affaiblisse le Labour. Mais le Premier ministre a tenu bon et a, en deux ans, mené à bien sa réforme de l'Etat. Margaret Thatcher a révolutionné, pour le meilleur et pour le pire, l'économie et l'organisation sociale de la Grande-Bretagne; Blair, lui, veut transfigurer la Constitution de son pays. Il y a dans cette volonté trace de son