Polince envoyé spécial
Lumière tamisée, ronronnement du générateur: dans son cocon blindé, l'équipe de quart navigue doucement entre veille et sommeil. Une nuit trop calme. Six heures à s'user l'oeil et l'oreille sur la console du radar pour une pêche bien maigre. Pas le moindre mouvement de char ou de garnison. Lourdement bombardées dans la soirée précédente par une noria d'avions de l'Otan, les forces serbes n'ont pas bougé de leurs abris, attendant l'aube. Arrimé à son écran de contrôle, le sergent-chef du 35e régiment d'artillerie parachutiste balaye sans relâche la ligne de crêtes qui lui fait face. La frontière yougoslave court sur ces sommets bordés de brume, toute proche des avant-postes français en Macédoine.
Signature sonore. «Notre matériel nous permet de détecter, au son, un véhicule ou une personne jusqu'à 20 kilomètres. On peut les suivre, déterminer leur axe de progression et renseigner l'arrière sur une éventuelle manoeuvre d'infiltration», explique l'opérateur qui s'acharne à filtrer un sifflement grave couvert de crachotements. «Bovins à la pâture, conclut l'artiste, triste sourire de victoire aux lèvres, un troupeau de vaches a pratiquement la même signature sonore qu'une colonne de fantassins, mais on fait quand même la différence. Les vaches, c'est plus flou, moins saccadé.» Démonstration. Le haut-parleur lâche une longue expiration piquée de parasites: «Voilà les vaches». Le sergent a l'air sûr de son coup, tourne quelques molettes. Nouvelle plainte cacoc