Allemand, mais heureux (1) proclame le titre d'un des nombreux
petits manifestes publiés ces dernières années pour explorer où va l'Allemagne, entre retour de la nation et crise de son modèle économique. L'auteur, Bernd Ulrich, 38 ans, est ancien conseiller des Verts, aujourd'hui responsable des pages opinion du quotidien berlinois Tagesspiegel.
Pourquoi les Allemands ne célèbrent-ils pas ces 50 ans avec plus d'entrain?
D'abord parce que le Kosovo gâte un peu l'ambiance. Ensuite parce que se pose encore la question: «Qui sommes nous?» De guerre en guerre, l'Allemagne assume plus de responsabilités. Pendant la guerre du Golfe, elle n'a fait que payer. En Bosnie, elle a envoyé des troupes qui ne devaient pas intervenir sur le terrain. Cette fois, nous avons des forces qui bombardent. Les choses sont clarifiées: l'Allemagne est une grande puissance européenne, même si elle n'a pas le droit de le dire.
Votre livre ne décrit-il pas l'Allemagne dans une «crise» interne aussi profonde qu'en 1968?
La crise que je décris est celle d'une société habituée à une hausse constante de son bien-être. La particularité est qu'en RFA après la guerre, démocratie et bien-être ont été étroitement associés. En cas de crise économique, la France a son passé pour s'appuyer: un mur fait de vérités et de mensonges, mais qui tient. En Allemagne, cet appui manque. La RFA n'a pu bâtir qu'un sentiment communautaire diffus, autour de quatre valeurs: le succès économique, la conscience écologique, les principe