Moscou, de notre correspondant.
Partis à pied de Yalta, de Soudak et de Kerch le 6 mai, ils sont arrivés à Simféropol le 18 mai où d'autres compatriotes les attendaient. Combien étaient-ils? 35 000, dit l'AFP. Ce n'étaient pas des déportés chassés de leur terre comme les Kosovars, ou plutôt ils ne l'étaient plus, déportés. C'étaient des Tatars de Crimée. Revenus vivre au pays qui était avant le leur (depuis le XIIIe siècle), revenus depuis dix ans seulement, après un long exil forcé en Asie centrale. Et ils avaient organisé cette longue marche et cette manifestation une de plus pour demander que les autorités ukrainiennes (maîtres de la Crimée au-delà du statut d'autonomie de cette région) ne les considèrent plus comme une communauté de «deuxième classe», un terme que ne renierait pas Milosevic à propos des Kosovars. Il y a entre ces deux peuples, outre la rime, l'expérience partagée de l'exil forcé et brutal, le balluchon fait à la va-vite, les vieux et les faibles qui meurent sur le chemin, l'humiliation, la perte, l'identité niée. La date du 18 mai n'est pas hasardeuse pour les Tatars de Crimée. Chaque année, elle réveille la blessure. Car c'est dans la nuit du 18 mai 1944 que commença leur déportation, décidée par Staline qui, parce que les Allemands avaient occupé la région, décida que tous les Tatars étaient des fieffés collaborateurs. Ils étaient aussi des musulmans face à des autorités slaves et orthodoxes. Comme au Kosovo. Trains à bestiaux. Staline n'était p