Les autorités marocaines viennent de rater une occasion de montrer
qu'elles envisagent la question des droits de l'homme avec sérénité. Elles ont en effet interdit le congrès d'Amnesty International qui devait réunir, en août à Rabat, quelque cinq cents délégués de l'organisation humanitaire venus du monde entier. Le Maroc, qui, depuis l'entrée en fonction du gouvernement socialiste d'Abderrahmane Youssoufi il y a moins de deux ans, a beaucoup fait pour tourner la page des «années de plomb», se prive ainsi d'une réunion qui aurait de facto consacré ses efforts en la matière.
Rien n'a été signifié officiellement à Amnesty des raisons à l'origine d'une décision qui lui a été transmise verbalement par l'ambassade du Maroc à Londres. Un hebdomadaire proche de Driss Basri, l'inamovible ministre de l'Intérieur, a cependant levé un coin du voile. Il déplore dans sa dernière livraison qu'Amnesty «tienne à organiser en marge de son congrès des manifestations sur les droits de l'homme chez nous». Or, affirme ce journal, «ce dossier est apuré par le royaume». Rabat considère en effet qu'en dépit de «quelques très rares cas», le Maroc n'a plus à rougir de son attitude dans ce domaine et refuse surtout de considérer les prisonniers ou les «disparus» sahraouis comme des détenus politiques. Ce dernier point pourrait expliquer, en partie au moins, le revirement marocain, même si les «messages» de Rabat à Amnesty sont, remarque l'organisation, «différents, voire contradictoires». Pour les uns