Orahovac, envoyé spécial.
Des pans de murs noircis et des poutres calcinées sont tout ce qui reste de la grande villa blanche. Le domicile du Dr Vekoslav Simic a brûlé il y a une semaine. A Orahovac, personne n'y a fait attention car, chaque jour, une bonne demi-douzaine de maisons serbes continuent de partir en fumée. Mais, parmi les Albanais de la vieille ville, tout le monde connaît les raisons de cet incendie-là. «Il était le seul Serbe du quartier, et on le traitait comme un roi. On l'invitait aux mariages et nous chantions en serbe en son honneur mais il nous a trahis», explique Avni Dema. Quelques jours après les premières frappes de l'Otan, le médecin est venu chercher son oncle et sa tante pour qu'ils rouvrent leur magasin. Depuis, nul ne les a plus revus. «Ils étaient sous sa responsabilité, il doit nous dire ce qu'ils sont devenus», insiste le jeune homme.
Le médecin a fui en même temps que les derniers soldats serbes. Il vit à quelques centaines de mètres de là, au bout de la rue qui grimpe à flanc de colline. De temps à autre, une Jeep, des soldats néerlandais de la Kfor, parcourt le no man's land. Mais cette impalpable frontière est hermétique, passant au milieu des vieilles maisons de Orahovac, 25 000 habitants avant guerre, à 80% albanais. Ces derniers ne montent jamais vers la ville haute, et les 3 000 Serbes restants ne sortent plus de ce réduit même pour faire des courses, sinon quelques petites vieilles qui s'aventurent parfois jusqu'au marché, accueillies