Une plaque sur la grille d'entrée intercepte le regard avant qu'il
ne s'attarde trop sur les coulées noirâtres qui maculent le dôme de la centrale: «Performances de la centrale d'Obrigheim depuis le 29 octobre 1968 jusqu'à aujourd'hui: plus de 70 milliards de kilowatts/heure de courant produit et ainsi plus de 70 millions de tonnes de CO2 évités!» Un fanion, planté pour le 30e anniversaire du site, complète le dispositif d'accueil: «Trente ans de production de courant sûr, propre et fiable.» D'entrée, il est clair que la centrale d'Obrigheim (sud-ouest de l'Allemagne) se trouve en terre hostile: au pays où le nouveau gouvernement rouge-vert a décidé la mort prochaine de l'énergie nucléaire.
Des 19 centrales en activité en Allemagne, Obrigheim est la plus petite, mais aussi la plus vieille et donc la plus menacée. En activité depuis 1968, elle est la centrale symbole, enjeu d'une farouche négociation en cours entre le gouvernement et les compagnies électriques. Les Verts voudraient réduire à moins de trente ans la durée de vie de chaque centrale et exigent le débranchement d'au moins un site durant cette législature (d'ici 2002): le «réacteur ferraille» d'Obrigheim. Pour Energie Baden-Würtemberg, son actionnaire principal, Obrigheim n'est qu'un site mineur, mais le groupe ne s'y accroche pas moins, dans l'espoir de retarder tout le processus de sortie du nucléaire. Visite au sein d'une centrale conçue pour vivre quarante ans et qui se bat pour ne pas être «l'offrande sacrifiée