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Libération

La turquie enterre ses mortsRedoutant les épidémies, les autorités enfouissent les cadavres, alors que les secouristes étrangers quittent le pays.

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publié le 23 août 1999 à 0h15

Ce week-end, la Turquie semblait n'être qu'un gigantesque

enterrement. L'accumulation des ordures, l'absence de sanitaires, la décomposition des corps dans les ruines a lancé une course contre une autre mort, celle due aux épidémies. Etabli jusqu'à présent à plus de 12 000 victimes, le bilan, qui continue à s'aggraver de jour en jour, pourrait atteindre les 40 000, selon l'ONU. «Nous espérons avoir enseveli les cadavres et déblayé d'ici à dix à quinze jours», a déclaré Yasar Okuyan, le ministre turc du Travail, dont la famille est toujours sous les gravats.

A Yalova, une ville particulièrement touchée sur la mer de Marmara, quarante imams se relaient en permanence au cimetière pendant que deux pelleteuses creusent pour préparer des tombes. Un homme agenouillé non loin, devant la tombe de sa femme, a planté un bout de bois dans la terre. Il y a griffonné au stylo l'identité de la morte, sa date de naissance et celle de sa mort, le 17 août 1999. Mais, soudain, il ne sait plus: «Peut-être a-t-elle succombé plus tard?»

Tranchées aux bulldozers. Quelques dizaines de kilomètres plus loin, la ville de Gölcük a renoncé à un semblant de cérémonie. Dès que les cadavres sont retirés des ruines, ils sont enveloppés dans des linceuls blancs, entassés dans des camions et conduits jusqu'à un terrain situé près du cimetière, où des bulldozers creusent inlassablement des tranchées. Les fossoyeurs versent dessus de la chaux et des désinfectants. Parfois, on n'a pas le temps de les identifier, e