Cinarcik, envoyé spécial.
Le nom du quartier ou vivait Selma est peint sur le mur de l'un des derniers immeubles toujours debout: cité Camlik. Avec son mari Halit, ils avaient choisi ce petit coin niché dans une crique de la mer de Marmara pour son climat, «et pour fuir la pollution d'Istanbul. Surtout, le prix de l'appartement était dans nos petits moyens.» C'est une publicité du promoteur Yeli Coger qui les avaient attirés ici en 1994. Aujourd'hui c'est l'homme le plus recherché de Turquie. «Avec ses immeubles fabriqués de travers, ce type a tué des centaines de personnes.» Toujours en fuite, Coger a téléphoné à une chaîne TV depuis sa planque, la semaine dernière. Il a déclaré, plutôt serein que, «sur les 1 500 immeubles qu'[il a] construits, les deux tiers n'ont pas bougé pendant le séisme». Selma habitait dans un appartement du tiers restant. Au 5e et dernier étage du dernier immeuble de la cité Camilk, tout en haut de la baie. «Du balcon, on voyait la mer et de la cuisine, sur l'arrière, les oliviers.»
«Je devais mourir.» Cette nuit du lundi au mardi 17 août, elle et son mari dormaient depuis plusieurs heures déjà. Dans une chambre à côté était couchée la mère de Selma, de passage à la maison. «Ça a commencé à vibrer avec un bruit épouvantable. Ça bougeait tellement qu'on ne pouvait pas tenir debout. Halit s'est accroché au matelas et puis tout s'est éteint et on est tombé. Dans ma tête, j'essayais de compter les étages qui nous séparaient du sol. 4,3,2,1. A l'arrivée,