Las Vegas, envoyé spécial.
Visiter Las Vegas, c'est passer de l'autre côté du miroir de la mondialisation et y entrevoir dans la boule étincelante des néons ce que sera peut-être le XXIe siècle. Le Strip, la longue avenue qui traverse la ville du sud au nord, ressemble de plus en plus au site de ces expositions coloniales qu'on organisait au début du XXe, en France ou en Grande-Bretagne, célébrations éphémères et tout en toc d'empires coloniaux présentés à la curiosité des foules.
Philosophie. Oscar Goodman, nouveau maire de la ville et ex-avocat de la Mafia, promet de faire de Las Vegas «une capitale du XXIe siècle». Sa philosophie est celle du concentré d'exotisme pasteurisé. «Venez à Vegas et vous n'aurez plus envie de voyager, promet-il. Vous voulez voir New York? On a New York. Vous aimez Venise? On a Venise. Vous rêvez de Paris? Voilà Paris!» Existent aussi la Birmanie (Mandalay), l'Egypte (Louxor), Monaco (Monte Carlo), l'Italie (Bellagio), le Brésil (Rio), la forêt amazonienne (Mirage), la Rome antique (Caesar's Palace) et même les contrées imaginaires des chevaliers de la Table ronde (Excalibur), des pirates (Treasure Island) ou du magicien d'Oz (MGM Grand).
Et ça marche. Formidablement, même. Las Vegas est la première destination touristique au monde: 30,5 millions de visiteurs en 1997, plus de 32 millions attendus cette année trois fois plus qu'à Paris. Les plus grands hôtels de la planète (le MGM Grand a plus de 5000 chambres) affichent des taux d'occupation qui