Londres, de notre correspondant.
D'une voix monotone, une greffière du tribunal de Bow Street, qui doit décider de l'extradition vers l'Espagne du général Pinochet, a lu hier le long catalogue des crimes reprochés à l'ancien dictateur. Ecorchant les noms en espagnol, l'employée du tribunal a cité ainsi, parmi 34 cas monstrueux, celui d'Antonia Liberona Ninoles. Du 20 août 1989 à une date inconnue, elle a été privée de sommeil, interrogée, alors qu'elle avait été mise à nu, et menacée, si elle ne parlait pas, de voir sa fille de 9 ans maltraitée. «C'est vous, en tant que commandant en chef des forces armées, avec d'autres officiels, qui avez infligé de sévères souffrances», a répété 34 fois l'employée, comme si elle s'adressait au général, le grand absent du tribunal de Londres, excusé pour raisons de santé.
Fantômes. Ces accusations constituent l'essentiel de la demande d'extradition espagnole, depuis la décision en mars des lords de limiter les crimes dont il est redevable aux accusations de torture postérieures à la ratification de la Convention sur la torture par Londres, en 1988. «Il s'agit des plus sérieuses accusations qu'a eu à entendre un tribunal britannique», a commenté l'avocat londonien, présentant la position de l'Espagne. Selon Me Alun Jones, la torture était systématique et répandue depuis le début de la dictature militaire de Pinochet en 1973, jusqu'à ce qu'il rende le pouvoir en 1990. Evoquant les fantômes des milliers de victimes de la junte chilienne, l'avo