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Libération

«Les policiers nous ont suspendus, pieds et mains liés». Ayant subi la torture du«jaguar», un Négro-Mauritanien témoigne.

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publié le 29 septembre 1999 à 0h55

Dakar, de notre correspondante.

Sa première arrestation remonte à novembre 1986. La police mauritanienne déboule chez lui, un soir, et l'embarque couché dans une voiture, les yeux bandés. Une trentaine de Négro-Mauritaniens comme lui sont arrêtés le même jour et conduits dans la «maison de torture». C'est là qu'il découvre le «jaguar». Sous couvert d'anonymat, il raconte: «Les policiers nous ont lié les mains et les pieds, et glissé un bâton entre nos membres pour nous suspendre entre deux tonneaux ou piquets.» Pendant plusieurs heures, il est resté ainsi «pendu comme une outre», la tête en bas, frappé à la cravache par des gardes. «Ils voulaient des noms de directeurs de société ou de fonctionnaires, tous Négro-Mauritaniens, comme pour les dénoncer.»

«Nationalisme étroit». La répression ne visait que des Négro-Mauritaniens, soupçonnés de «nationalisme étroit». Les tortionnaires étaient des Maures blancs ou des haratines ­ anciens esclaves affranchis. «Un policier m'a giflé, puis m'a mis le pistolet dans l'oreille en me disant: "Tu avoues ou je te tue.» Ce policier, un haut gradé, est venu tous les jours. Au total, une vingtaine de policiers se relayaient. Certains d'entre eux venaient de Nouakchott, la capitale. Entre deux séances de torture, les détenus étaient enfermés dans des WC de 75 cm de long sur 50 cm de large, où il était impossible de s'asseoir.

«Pas activiste». Le régime pourchassait les membres du Flam, le Front de libération africain de Mauritanie, qui avait diff